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Stalag VII A: Témoignages


Paul Delavaud
Mémoires de Paul Delavaud

Mémoires de Paul Delavaud

Transcrit du carnet original par Jean-François Delavaud.

Ma vie de prisonnier

[1940]

Fait prisonnier le 22 juin à Housseville, dans un champ planté d’arbres fruitiés. Nous nous constituons prisonniers, après avoir déposé les armes. Nous sommes conduits à 10 km par les Allemands, dans un camp marécageux; entouré d’un coté par une rivière et de l’autre par une route et le voie ferrée, entre Poussay et Mirecourt dans les voges. Nous y avons passés une nuit très fraîche. Le nom de la rivière est Meudon.

Le 23juin, réveillé par le froid de très bonne heure, je recherche un ¼ de jus. Montage de la tente. Repas du midi néant. 1 biscuit de guerre par homme et une boite de singe à 12 pour le soir, ce qui est très maigre.

Le 24 juin, avec ¼ de jus fait avec de l’orge grillée, nous partons faire une corvée qui nous rapporte quelques victuailles.

Mémoires de Paul Delavaud Le 25 juin, même corvée.

Le 26 juin, déplacement de la tente par un très mauvais temps. Nous couchons sur la terre toute mouillée.

Le 27 juin, nous partons en corvée avec une boule de pain pour 45 hommes et pour toute la journée.

Le 29 juin, jeu de cartes toute la journée. Je gagne 180f à la banque.

Le 30 juin, lavage du linge et jeu de banque. Toujours de la chance.

Le 1er juillet, je fais un briquet avec une fusée.

Le 2, nous avons pour le midi 18 lentilles chacun et 2 biscuits de guerre chacun pour le soir.

Le 3 juillet, je tresse un ceinturon et nous jouons au 17. Jeu d’argent. Je perds 30f.

le 4 juillet, jeu de banque. Nous touchons une boule en 10.

Le 5 juillet, je fais la cuisine avec Des conserves ramassées en corvée.

Le 6 juillet, je pêche dans la rivière Meudon qui passe dans les camps, 42 poissons qui sont artagés entre 12. Passage des troupes, je suis mal.

Le 7 juillet, corvée de soupe et jeu de cartes toute la journée.

Le 8 juillet, nous écrivons la 1ere lettre

Le 9 juillet, jeu de carte.

Le 10 juillet, corvée de soupe et je tresse un ceinturon pour un copain.

Le 11 juillet, corvée. Nous mangeons en dehors du camp.

Le 12 juillet, jeu de carte.

Le 13 juillet, corvée de soupe.

Le 14 juillet, départ pour un asile à Mirecourt.

Le 15 juillet, jeu de carte.

Le 16 juillet, évasion de 2 hommes. Nous restons au garde à vous sous la pluie de 5h du matin à 3 h de l’après- midi.

Le 17, renfermés dans une chambre pendant 6 jours.

Le 18 juillet, jeu de cartes jusqu'à 2h.

Le 19 juillet, nous changeons de bâtiments. De la chapelle nous allons au bâtiments 7. Nous y restons jusqu’au 29 août. J’ai reçu une lettre de mon beau père

le 20 août et un colis.

Le 29 août, départ du camp pour l’Allemagne à 11 heures. Trois jours De voyage renfermes dans un wagon A bestiaux. Trois jours de calvaire.

Arrivés à Mosburg le 1er septembre à 3 h du matin, nous sommes tondus à ras et nous sommes photografiés et fouillés.

Le 2 septembre, j’ai écris la 1ere lettre.

Le 9 septembre, jeu de cartes et visite Au marché fait par les polacs et les Sous officiers français. Chose honteuse, Le pain à 80f le kilo, le tabac à 100f le paquet, 5f une cigarette faite avec des mégots. Nous sommes volés par les gradés Français, ce qui écoeure tout le monde.

Départ de Mosburg le 1er octobre pour aller au komando dans les Alpes bavaroise à Haulen [?] où nous travaillons dans la montagne pour faire un pont sur un torrent. Nous mangeons mieux qu’au stalag VIIa.

Nous avons vu la neige le 26 octobre, un samedi. Toujours sans nouvelles et le cafard qui ne me quitte jamais surtout de voir les camarades recevoir des lettres et des colis, surtout les camarades du pays.

Le 27 octobre, dimanche bien triste sous Son linceul blanc. Je fais un plumier pour ma petite Annick. J’oubliais de dire que noue étions dans un coquet chalet fait en sapin. Nous mangeons quelques truites prisent à la main, ce qui rallonge le repas. La journée se termine par une partie de cartes.

Le 28 octobre, journée neigeuse. Nous travaillons par un froid à remblayer un chemin. Toujours sans nouvelles. Journée passée à avoir les pieds gelés. Je n’ai pas de chaussettes et j’ai des bottes en caoutchouc et nous travaillons dans dans l’eau. Comme repas, c’est toujours des patates, un bout de charcuterie, un morceau de margarine qui n’est pas de 1ere qualité. Je vais au lit avec dans la pensée l’image de mes deux chéries

Le 29 octobre, de la neige et toujours le Même travail.

Le 30 octobre, journée passée au lit car j’ai de la dissentrie. Toujours de la neige et du froid.

Le 1er novembre, nous avons travaillés toute la journée. Journée pluvieuse et fonte de la neige. Toujours sans lettre.

Le 2 novembre, triste journée. Je me suis levé à 8h. Toujours le cafard.

Le 3 novembre, toujours la pluie et la boue et le cafard.

Le 4, 5, 6 novembre, mêmes journées.

Le 7 novembre, toujours sans lettres et le cafard. Je me demande si l’on pense à moi.

Le 8, il tombe de la neige. Toujours le même boulot. Voila la vie de 1940.

Le 9 et 10, toujours pareil.

Le 11, je change de travail. Je fais les réparations d’un chemin sur l’autre versent de la montagne à 1950 m d’altitude. Les anglais sont venus bombarder Munich.

Le 19, nous changeons de montagne, mais c’est tout le temps le même boulot accompagné du Cafard. Si encore j’avais du tabac.

Le 14. 15. 16, toujours pareil.

Le 17, triste dimanche passé à pécher des truites et sans nouvelles.

Le 18, toujours même boulot

Le 19, journée très froide. J’ai vu pour la 1ere fois 2 hermines que j’ai essayées de capturer.

Le 20, journée passée à ramasser des marrons d’inde pour monter dans la montagne, ce qui sert de nourriture aux chamois. J’ai volé une musette de patate car dans ce pays, ils nourrissent les cerfs et les biches avec des carottes et des patates et pendant ce temps, nous la crevons.

Le 21, travaux au chemin.

Le 22. 23 et 24, montage de tuyaux avec les civils. Quelle joie, je reçois les 1ere lettres.

Une de mes parents, une de mon beau père. Tout va bien. Je n’ai plus le cafard.

Le 26, journée passée à sortir des graviers d’un torrent. Il fait un soleil magnifique mais il gel à pierre fendre et la neige ne fond pas.

Le 27, même travail mais je reçois le 1er colis de ma femme. Adieu le cafard.

Le 29, nous travaillons dans 40 cm de neige à sortir des pierres. J’ai les pieds gelés. Je reçois 6 lettres de ma femme, ce qui m’enlève la fatigue.

Le 30, pas de travail0 je reçois un colis de 5 kg qui me fait plaisir.

Le 1er décembre, dimanche bien triste mais je n’ai pas le cafard car j’ai des nouvelles et du tabac.

Le 2, je reçois le 3eme colis. Je suis très heureux car je trouve le temps beaucoup moins long.

Le 9, journée très froide, toujours le même travail.

Le 4, journée très courte car j’ai fumé un paquet de tabac.

Le 5, journée très froide et neigeuse passée à la chambre pour foulure au poignet.

Le 6, même journée que la précédente. Nous avons touché la paye. 18 marcs.

Le 7 au 15, il tombe de la neige. Il y en a 1m de haut, jamais je n’en ai tant vu. J’ai bu du schnaps. Nous travaillons au déblayage des routes et il ne fait pas chaud.

Le 16 et 17, on enlève la neige des routes.

Le 18, je ne travaille pas car je suis malade. Je reçois un colis de 1kg de ma femme qui me fait bien plaisir. Il fait 28° au dessous de zéro (-28) et il fait un vent terrible.

Le 19, j’ai un peu le cafard.

Le 20, nous travaillons toujours dans La neige. Il fait toujours très froid.

Le 22, journée très froide.

Le 23, nous travaillons que le matin.

Le 24, noël bien triste. Nous ne travaillons pas. Le patron nous offre un arbre de Noël car ici, c’est la mode. Je vais à la messe.

Le 25, repos. Depuis deux jour nous mangeons comme des rois.

Le 26. 27. 28. 29. 30, toujours le même travail.

[1941]

le 1er janvier 1941, mous ne travaillons pas. Le patron nous offre 1un paquet de tabac chacun.

Le 2 janvier, il tombe de l’eau, ce qui fait du verglas sur la neige. Toujours même travail dans la montagne. Je perce des trous dans les roches pour les miner.

Le 3 janvier, je reçois 3 lettres de ma femme qui me fait bien plaisir. Nous faisons une battue pour les cerfs. Un des chasseurs meurt d’une congestion dans mes bras.

Le 4, je vais dans le haut de la montagne avec le contremaître pour chercher un genre de sapin pour faire une couronne pour le mort.

Du 5 au 8, rien de nouveau.

Le 9, je vais au dentiste qui m’arrache une dent et m’en plombe une. Je reçois une lettre de ma femme qui me fait bien plaisir.

Le 10, travaux dans la montagne.

Le 11, triste dimanche. J’écris une lettre à ma femme.

Le 12, toujours le même travail dans la montagne.

Le 13, j’ai une douleur dans la jambe et dans les reins.

Le 14, toujours même travail.

Le 15, je vais au docteur à Hohenachau [Hohenaschau] j’ai acheté une pipe. J’ai deux jours de repos.

Le 16, je me lève à10h et je lave mon linge. Le patron, monsieur Titerman [?] est venu me voir. C’est un très brave homme. Il a bon cœur.

Le 18 janvier, travaux dans la montagne.

Le 19 au 23, toujours pareil. Je reçois une carte de ma femme

le 24 janvier, je reçois un colis du chemin de fer avec 6 boites de conserves, 4 paquets de biscuits, 250g de chocolat, une 1/2 livre de dates, une paire de chaussettes, 1 paquet de tabac et cigarettes.

Le 25, toujours même travail et l’on fume.

Le 26, triste journée. J’ai le cafard.

Le 27 au 30, toujours même travail et du froid.

Le 31, journée de chasse. Je reçois une carte de ma femme.

Du 1er au 9, toujours pareil.

Le 10, on a enlevé la neige des routes.

Le 11, je passe des pommes de terre aux bûches.

Le 12, je descend du linge du haut de la montagne.

Le 19, on reprend le travail au chantier.

Le 14, il retombe de la neige. On fini le travail à 3h ½.

Le 15 et 16, toujours pareil.

Le 17 au 19, rien à signaler.

Le 20, je reçois une lettre de ma femme.

Le 21, je vais au dentiste me faire arracher la dent qu’il m’avait plombée.

Le 22, je ne travaille pas car j’ai un abcès.

Le 23, dimanche, nous travaillons à déblayer les chemins car il a tombé de la neige. L’après midi, je fais du ski, ce qui est très amusant.

Le 24, toujours le même travail et il ne fait pas chaud.

Le 25, je travaille à tirer du sable dans la rivière malgré la neige.

Le 26, 27, 28, même travail.

Le 1er mars, je remonte au chantier car il y a eu le dégel et le torrent coule. Je reçois un colis de ma femme qui m’a fait bien plaisir.

Le 2 mars, travail au chantier et il ne fait pas très chaud.

Le 3 mars, il tombe de la neige.

Le 4 mars, toujours pareil.

Le 5 mars, nous mangeons des petits pois avec des carottes.

Le 6, 7, 8, toujours pareil.

Du 9 au 16, nous sortons du gravier du torrent pour faire une maison.

Le 17 au 20, toujours pareil.

Le 21 au 23, arrêt pour maladie. Je reçois le colis étiquette [?] qui me fait bien plaisir.

Le 24 au 29, rien de nouveau, à part une lettre que j’ai reçue et le départ d’un camarade en France.

30 et 31, toujours pareil.

1 au 3, je reçois 2 lettres de ma femme.

4 et 5, rien de neuf.

6, triste dimanche.

7, 8, 9, triste journées passées sous la neige à travailler. je rentre fatigué tous les soirs.

10, 11, 12, je reçois le colis étiquette. [?]

13, 14, il tombe de la neige.

14 au 25, toujours pareil, on trouve le temps long.

15, on fait la plantation des sapins.

16, on arrache des jeunes sapins pour les replanter.

Du 17 au 20, toujours pareil, très mauvais temps.

Du 20 au 28, on fait un chemin. Je roule la brouette tous les jours. Journées très fatigantes.

Le 28, je reçois une lettre et un colis de ma femme qui me font bien plaisir car j’ai toujours ce maudit cafard. Nous touchons 5 paquets de cigarettes et un paquet de tabac d’un colis envoyé de France.

Le 29, journée passée à planter des sapins. Nous les plantons sur le flans d’une montagne, ce qui est très fatigant et qui me donne encore plus le cafard.

Le 30, journée très chaude. La neige fond, mais très fatigante.

Le 1er mai, nous ne travaillons pas car c’est la fête du travail. Une journée pluvieuse.

2, triste journée.

03.05.41, il neige toute la journée.

04.05.41, je reçois un colis de ma femme qui m’a fait bien plaisir. La journée se passe à jouer au volley-ball, dont je suis capitaine d’une équipe. Nous avons mangé 800 escargots que j’ai ramassés.

Le 5 mai, lundi, je ne travaille pas car je n’ai pas de chaussures. Je rêve à ma petite femme aimée.

Je 6, je travaille à la plantation des sapins.

Le 7, j’ai la grippe et je ne travaille pas. Je lave mon linge.

Le 9 et 10, je ne travaille toujours pas. Il fait très froid.

11, je travaille à la plantation des sapins.

12, je bêche un jardin.

13, je reçois un colis de ma femme qui me fait bien plaisir, mais je suis déçu car il n’y a pas de tabac. Je reçois des photos de ma fille qui me font plaisir.

14, journée crevante dans la montagne.

15, journée passée dans la montagne avec le cafard.

16, je reçois trois lettres de ma femme qui me font très plaisir.

17, triste journée.

18, dimanche très triste, il tombe de l’eau.

19 au 24, toujours pareil. Il tombe de l’eau et de la neige. Les civils parlent que l’on va être libérés au mois d’août.

25 mai au 2 juin, nous faisons 12 h de travail par jour.

3 juin, il fait très chaud.

4 au 10, on travaille 12 h, je suis très fatigué. Je reçois un colis de ma femme avec un brin de muguet. Je suis heureux. Il fait très mauvais temps.

11 juin, je reçois un 2eme colis. Travail très dur.

12 juin, journée pluvieuse.

13, je reçois 3 lettres de ma femme. Je suis très content.

14 au 17, toujours pareil. Nous faisons les maçons et le cafard qui ne me quitte plus.

17 au 21, je travaille dans la culture. Je fauche toute la journée. Je suis fatigué Et j’ai le cafard.

21 au 30, toujours le même travail et plus ça va j’ai le cafard. J’ai travaillé toute la semaine chez une artiste de cinéma qui est très jolie. Malgré sa beauté, elle ne vaut pas ma petite femme aimée.

Du 30 au 10 juillet, toujours le même travail et beaucoup de cafard.

11 au 14, je travaille toujours à la ferme.

Le 15 juillet, journée passée à faucher je pique un chevreuil avec une fourche. Prêt à le saigner, des gens passent sur la route et me le font sauver. Nous travaillons de 5h du matin à 8h du soir.

16 au 21, toujours pareil et le cafard qui ne me quitte pas.

21 au 1er août, rien à changer.

Le 2, départ de Sachrau [Sachrang?] pour un autre Komando. Tout le mois se passe au même travail. Toujours pareil jusqu’au 29 octobre.

1ere journée de neige. Je fais du béton et il ne fait pas chaud.


Noms et adresses de prisonniers qui étaient avec mon père:

Mémoires de Paul Delavaud Mémoires de Paul Delavaud

Top Source:

  • Courriers et CD de Jean-François Delavaud, Châlons-sur-Saône, à Moosburg Online, mai 2003, mai 2007.

    Reproduction avec permission de © Jean-François Delavaud.

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